Genieve Figgis
L'Almanach 18 : Genieve Figgis

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Consortium Museum
Curated by Eric Troncy
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Genieve Figgis, "L'Almanach 18," 2018, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum

L’exposition de Genieve Figgis pour L’Almanach 18 comprend une quinzaine de « nasty entertaining pieces of work » (pour reprendre les termes de Roberta Smith dans le New York Times). Cet ensemble d’huiles sur toile et de tempéra sur bois, inédites, poursuivent son exploration de l’histoire de la peinture en général et de la « conversation painting » en particulier – un genre qui connut un certain succès au XVIIIe siècle, avec ses portraits de groupes représentant des membres d’une même famille ou des ensembles d’amis, saisis dans des activités diverses et parfois anecdotiques : des repas, des parties de campagne, des récitals – exécutés sur des formats de taille modeste. Entre autres sujets, Figgis donne d’ailleurs ses propres versions de tableaux classiques de Watteau (Le Pèlerinage à l’île de Cythère, 1717) ou de Fragonard (Les Hasards heureux de l’escarpolette, 1769) infligeant à ces chefs d’œuvres les outrages de sa technique personnelle. Celle-ci relève d’une alchimie complexe qui conduit souvent la matière picturale à donner le sentiment qu’elle a coulé puis fondu, comme la cire d’une bougie. Les formes s’y dissolvent entre elles, floutant les contours des corps ou des décors avec la même assurance qu’un miroir déformant dans un palais des glaces. Les scènes y gagnent une sidérante « irréalité », s’imposant comme de
probables mirages de vapeur dans un désert écrasé de chaleur. Est-ce en raison de ces risibles distorsions, ou de la sorte d’hébétude que trahit leurs yeux sommairement exécutés, qu’on s’attache immédiatement, affectivement, aux personnages des peintures de Figgis ? Ils sont à la fois figurés et défigurés, comme ceux de James Ensor.
« Art history, architecture, and music stand as documents of previous worlds », dit Geniève Figgis, résumant probablement ainsi le rapport des jeunes générations avec l’histoire de l’art. Son interprétation du tableau de Watteau, réalisée pour l’exposition, voisine avec des relectures de La Naissance de Vénus (1486) de Boticelli et des Trois Grâces (1635) de Rubens…
C’est peu dire que son oeuvre interroge très frontalement les notions de goût et de patrimoine ; de manière plus oblique, la mise en exergue des fêtes galantes et du libertinage n’est pas si éloignée que cela de la fonction critique qu’on assigne aux œuvres contemporaines.
Eric Troncy