Matias Faldbakken
Matias Faldbakken

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Le Consortium
Curated by Anne Pontégnie
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum
Matias Faldbakken, 2013-2014, exhibition view - photo © André Morin/Consortium Museum

Enfant terrible de l’art contemporain scandinave, Matias Faldbakken est encore peu connu en France. Il a représenté la Norvège à la Biennale de Venise en 2005, et son œuvre a bénéficié d’une première rétrospective – Schocked into Abstraction –  au musée national des Beaux-Arts d’Oslo en 2009. C’est d’abord en tant qu’écrivain – sous le pseudonyme d’Abo Rasul – que Faldbakken a fait sensation. L’humour acide et provocateur de sa trilogie à succès – Trilogie de la Mysanthropie Scandinave composée de Macht und Rebel, Coka Hola Company et Unfun – a suscité de nombreuses réactions, admiratives et choquées, en Norvège aussi bien qu’en Allemagne où elle a été adaptée au théâtre. Pornographie, anarchie, racisme, désespoir, la trilogie se caractérise par une approche frontale qui se retrouve dans l’œuvre plastique de Faldbakken, même si ce dernier insiste pour maintenir une frontière étanche entre ses deux activités.

Les premières œuvres de Faldbakken citent volontiers des gestes associés à ceux que la société identifient comme des menaces : terroristes, drogués, graffeurs… Carcasses de voitures brûlées, accumulations de bouteilles d’alcool, murs de carrelage aux graffitis effacés composent un paysage désolé dans lequel viennent se poser quelques images trouvées sur internet, quelques toiles ou panneaux sur lesquels Faldbakken tantôt pose du ruban adhésif, tantôt vide une bombe de peinture. En multipliant les gestes de destruction ou d’abandon, en utilisant leur frontalité tout en assumant leur esthétisation, Faldbakken parvient à exprimer « la volonté de ne rien exprimer », à maintenir un équilibre qui sauve son œuvre de la naïveté comme du cynisme tout en acceptant de s’y exposer.

À ces œuvres qui continuent à se référer à la peinture et à la sculpture même de manière très détournée, Faldbakken ajoute des interventions spécifiques. À la dernière Documenta, il avait simplement jeté au sol plusieurs rayonnages de la bibliothèque municipale. À la Power Station de Dallas, il a recouvert le sol de douilles de revolver. À Kassel, il a vidé les extincteurs dans une des salles de l’exposition souillant ses œuvres d’un résidu grisâtre. À Oslo, il a suspendu la tête en bas des œuvres des sculpteurs norvégiens modernes les plus célèbres, de Vigeland à Haukeland.

Ces dernières années, l’artiste a substitué aux références directes à la sous-culture qui caractérisaient le début de son œuvre, des références plus neutres à des objets quotidiens et universels : ruban adhésif, sacs plastiques, boites en carton, armoires en métal, réfrigérateurs, pots d’échappement et sangles sont désormais ses principaux outils de composition. Soudés, compressés, ou découpés, ces matériaux sans intérêt lui permettent de produire des expositions partout dans le monde, en fonction des lieux et des réalités qui leur sont associées.

C’est à partir de cette économie que l’exposition du Consortium s’est constituée. À partir de l’idée d’une rétrospective quasiment sans transport, et sans prêt, entièrement réalisée à partir de « gestes » rassemblés. Le musée des Beaux-Arts de Dijon a prêté une sculpture d’Henri Bouchard, « Le Faucheur », qui subira le même traitement que ses consœurs norvégiennes. Une grande installation de carrelage, des interventions sur des armoires et des réfrigérateurs seront réalisées pendant le montage de l’expo­sition. Une vidéo, des cartons et des sacs plastiques collés, encadrés ou jetés, une nouvelle sculpture en référence à Munch, des pots d’échappement découpés sont présentés en alternance avec une partie plus narrative et rétrospective composée d’images, elles empruntées à des collections privées.

Cette « anti » rétrospective permettra de se confronter à l’expérience physique que provoque l’œuvre de Faldbakken en même temps qu’elle tentera de montrer comment l’artiste s’attaque aux fondements critiques que la modernité a assigné à l’art pour ouvrir d’autres négociations entre l’art, l’artiste et la société qu’ils composent et à laquelle ils appartiennent.

Anne Pontégnie