Tursic & Mille
Tenderness

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Consortium Museum
Curated by Irène Bony & Eric Troncy
Vue de l’exposition « Tenderness » de Tursic et Mille, Consortium Museum, Dijon (FR), 2022.
Photo : Rebecca Fanuele © Consortium Museum
Vue de l’exposition « Tenderness » de Tursic et Mille, Consortium Museum, Dijon (FR), 2022.
Photo : Rebecca Fanuele © Consortium Museum
Vue de l’exposition « Tenderness » de Tursic et Mille, Consortium Museum, Dijon (FR), 2022.
Photo : Rebecca Fanuele © Consortium Museum
Vue de l’exposition « Tenderness » de Tursic et Mille, Consortium Museum, Dijon (FR), 2022.
Photo : Rebecca Fanuele © Consortium Museum
Vue de l’exposition « Tenderness » de Tursic et Mille, Consortium Museum, Dijon (FR), 2022.
Photo : Rebecca Fanuele © Consortium Museum

Ida Tursic (1974, Belgrade) & Wilfried Mille (1974, Boulogne-sur-mer). Vivent en France.


Avec le soutien de la galerie Max Hetzler, Paris, Berlin, Londres et de la galerie Almine Rech, Bruxelles, Paris, Londres, New York, Shanghai.
Remerciements: galerie Alfonso Artiaco, Naples, galerie Pietro Sparta, Chagny et Sylvie Winckler. 


 

Intitulée “Tenderness”, l’exposition Tursic & Mille présentée au Consortium Museum du 4 février au 22 mai 2022 rassemble une cinquantaine d’œuvres réalisées au cours des cinq dernières années – la moitié d’entre elles sont inédites. 

Elle comprend notamment diverses œuvres de la série Peindre la peinture, initiée l’an passé avec Blue Monday (2021) présentée à la galerie Max Hetzler de Londres. Réalisée essentiellement sur bois cette série dépeint des personnages aux prises avec des taches de couleur…

Tous deux nés en 1974, respectivement à Belgrade (Serbie) et Boulogne-sur-mer (France), Ida Tursic et Wilfried Mille travaillent ensemble depuis 2000. Peut-être parce que leurs peintures, apparemment figuratives, montraient à leur début des scènes érotiques ou reprenaient des images des films d’Andreï Tarkosvki, leur sujet a semblé de première importance. Il n’en est rien. Une manière efficace d’aborder leur peinture est paradoxalement de la regarder comme une peinture abstraite (ce qu’elle est fondamentalement) sur laquelle des éléments figuratifs concèdent au spectateur un peu du story telling qui semble gouverner aujourd’hui le rapport cool qu’il entretient avec l’art. Ainsi sur la grande toile abstraite La Cosa Emmental (2020) la représentation d’un petit morceau de fromage semble servir d’intercesseur pour entrer dans l’œuvre. 

Le sujet, dans la peinture de Tursic & Millle, est un leurre à tous les sens du terme : il trompe et il appâte. Car le véritable sujet de leurs œuvres est la peinture, dans une tradition classique qui va de Picabia à Christopher Wool.

“La question du comment faire présuppose celle du que faire, celle que Mario Merz posait en 1968. Dans la pratique, le comment faire provoque parfois le quoi faire. Pour nous, la peinture aujourd’hui ne peut plus se réduire à une question de style, ni d’appartenance à l’une ou à l’autre des deux fameuses catégories qu’étaient l’abstraction et la figuration... d’ailleurs depuis longtemps, les peintres abstraits ou figuratifs travaillent d’après des images reproduites. La peinture ce n’est pas ceci OU cela, la peinture c’est ceci ET cela. Tout ça en même temps ou tour à tour, la peinture c’est maintenant et c’est un vaste champ de possibles ! Nous sommes dans une époque de grande liberté (et elle est à portée de mains). Nous sommes donc dans notre pratique, opposés à une certaine conception monomaniaque de la peinture. La peinture ne peut pas être un geste figé et déposé comme un brevet, elle se doit d’être vivante, réflexive, en perpétuel mouvement. Elle doit être ouverte à toutes les propositions que sa pratique produira, la peinture doit être opportuniste et consciente d’elle-même.” déclaraient Tursic & Mille lors d’une conférence au Collège de France le 31 octobre 2014.

Présentée dans la dernière salle au Consortium Museum, l’œuvre Tenderness, qui donne son titre à l’exposition, est la reprise “augmentée” de Le Canard inquiétant (1959), une peinture de paysage trouvée au marché aux puces sur laquelle Asger Jorn avait peint un énorme canard proche du dessin d’enfant.

L’exposition “Tenderness” comprend également une installation faite -de plusieurs dizaines de mégots de cigarettes et de trognons de pommes (celles de Cézanne probablement) réalisés en bronze — développement totalement inédit dans l’œuvre de Tursic & Mille — associés à une version hitchcockienne de L’Hallali au Cerf (1867) de Gustave Courbet.

— Éric Troncy